En l’honneur du Mois de l’histoire des Noirs et des contributions faites par des Canadiens noirs et des Canadiennes noires dans les Forces armées canadiennes (FAC) et ailleurs, le Groupe consultatif des minorités visibles de la Défense (GCMVD) a organisé une séance de discussion qui donne matière à réflexion. Elle a eu lieu le 6 février 2025 au mess des officiers Waterloo, situé à la Base des Forces canadiennes (BFC) Borden.
Plusieurs membres des FAC hauts gradés et experts ont participé à la discussion, notamment le lieutenant‑colonel Felix Fonséca, commandant du Centre de développement de l’instruction des Forces canadiennes, le lieutenant‑colonel Maxime Champagne, commandant du Corps du Génie électrique et mécanique royal canadien, la capitaine Christa‑Gayle Clarke‑Edwards, l’adjudant Terry Afflick et l’auteure Lindsay Ruck.
La discussion a porté sur trois thèmes clés : les contributions historiques des Canadiens noirs et Canadiennes noires, l’importance de la représentation dans les FAC et les obstacles systémiques auxquels les communautés racisées sont toujours confrontées.
Une réflexion sur l’histoire : le 2e Bataillon de construction
Les participants ont pris le temps de bien reconnaître le 2e Bataillon de construction, le premier, et seul, bataillon composé uniquement de Canadiens noirs. Ce bataillon a vu le jour pendant la Première Guerre mondiale en réponse à la discrimination raciale qui empêchait les Canadiens noirs d’occuper des postes de combat. Ils s’étaient fait attribuer des tâches non liées au combat, telles que la construction de routes et de fortifications.
Le lieutenant‑colonel Champagne a insisté sur l’importance de reconnaître les premières luttes à cet égard.
« Le 2e Bataillon de construction témoigne de la persévérance de ces hommes. Ils voulaient servir leur pays en dépit de tous ceux qui affirmaient qu’ils n’étaient pas les bienvenus dans des postes de combat. Leur dévouement a ouvert la voie aux prochaines générations de Canadiens noirs et de Canadiennes noires dans les FAC », a-t-il salué.
Les panélistes ont également souligné les excuses officielles du gouvernement du Canada, présentées en 2022 aux descendants des membres du bataillon, qui ont marqué une étape importante. Toutefois, selon eux, elles doivent être accompagnées de mesures sérieuses afin de corriger les inégalités qui persistent au sein des FAC et dans la société en général.
La représentation et le leadership au sein des FAC
Les panélistes ont raconté des expériences personnelles sur l’importance de la diversité dans les postes de leadership et la manière dont la représentation a une incidence sur les jeunes recrues. Le lieutenant‑colonel Champagne a réfléchi à sa propre carrière, remarquant qu’il était motivé par les personnes noires qui servaient de bons modèles dans les FAC.
« Voir une personne qui te ressemble occuper un poste de leadership affermit ton sentiment d’appartenance. Tu as ta place ici, et tu peux monter dans les échelons », a-t-il témoigné.
La capitaine Clarke‑Edwards lui a fait écho, ajoutant que le mentorat est essentiel pour éliminer les obstacles.
« Je me souviens être la seule personne de couleur dans un cours de leadership que je suivais au début de ma carrière. Parfois, je me sentais seule, mais grâce à mes mentors, qui comprenaient ce que je vivais, j’ai pu relever ces défis », a-t-elle raconté.
L’adjudant Afflick a rappelé que malgré les progrès accomplis dans les FAC à l’égard de l’inclusion, il existe toujours des lacunes à combler.
« Les FAC dénombrent plus de personnes noires occupant un poste de leadership aujourd’hui qu’il y a 20 ans, mais il reste du chemin à faire. La représentation n’est pas qu’une question de nombres; elle consiste à assurer que tous se sentent valorisés et écoutés », a-t-il soutenu.
Surmonter les défis : les obstacles systémiques dans les FAC
Bien des progrès ont été réalisés, mais il existe toujours des obstacles systémiques. De nombreux membres des FAC noirs continuent d’être victimes de préjugés et de microagressions tout au long de leur carrière.
Lindsay Ruck, écrivaine qui se spécialise sur l’histoire des Canadiens noirs, a fermement soutenu que ces obstacles ne sont pas une histoire ancienne; ils sont d’actualité.
« Les gens croient que le racisme est une chose du passé, mais il y a toujours de la discrimination dans les pratiques d’embauche, dans l’attribution de promotions et même dans les interactions quotidiennes », a-t-elle expliqué.
L’adjudant Afflick a donné un exemple de l’incidence que peuvent avoir des préjugés inconscients sur l’avancement professionnel.
« Il est arrivé que j’aie dû travailler deux fois plus fort pour être perçu sur un pied d’égalité avec mes collègues. Les militaires noirs ressentent souvent une pression constante de faire leurs preuves, ce qui peut être épuisant », a-t-il déclaré.
Un appel à l’action : bâtir un avenir plus inclusif
Pour clore la séance de discussion, les panélistes ont encouragé la poursuite des efforts visant à favoriser la diversité et l’inclusion au sein des FAC. Les panélistes ont également incité les membres de la direction à recruter davantage de personnes issues de divers horizons et à les appuyer et à leur offrir des occasions d’avancement professionnel.
La capitaine Clarke‑Edwards a souligné l’importance de l’éducation.
« Les FAC doivent ajouter l’histoire des Noirs aux programmes de formation et de perfectionnement et en faire l’éducation à longueur d’année, pas seulement pendant le Mois de l’histoire des Noirs. Comprendre les contributions des Canadiens noirs et des Canadiennes noires devrait faire partie de la culture militaire », a-t-elle avancé.
Le lieutenant‑colonel Fonséca a insisté sur la nécessité de tenir des conversations sur l’ethnie, l’identité et l’équité dans les FAC.
« Le changement ne survient pas du jour au lendemain, certes, mais il faut poursuivre les efforts. Des événements tels que cette séance de discussion est un pas dans la bonne direction », a-t-il affirmé.
Un regard sur l’avenir
Alors que les célébrations en l’honneur du Mois de l’histoire des Noirs se poursuivent à la BFC Borden, les commentaires formulés pendant la séance de discussion rappellent l’importance de reconnaître l’histoire, de favoriser la représentation et de supprimer les obstacles systémiques. Que ce soit à l’époque du 2e Bataillon de construction ou aujourd’hui, les récits et les expériences des membres des FAC noirs témoignent de la résilience et de la détermination qui ont façonné l’histoire militaire du Canada.
Grâce aux efforts acharnés du GCMVD, entre autres, les FAC s’orientent vers un avenir où tous ses membres, peu importe leurs origines, se sentent inclus, habilités et valorisés lorsqu’ils servent le Canada.